Le débiteur de l’indemnité d’éviction en cas de démembrement de la propriété

Article publié au sein de la « Revue des Loyers» n°1003 de janvier 2020

Cass. 3e civ., 19 déc. 2019, n° 18-26.162, P+B+I

Mots-clés : Bail commercial • Démembrement de la propriété • Nu-propriétaire • Usufruitier • Congé • Indemnité d’éviction

Textes visés : Code de commerce – Article L. 145-14 – Code civil – Article 595
Repère : Le Lamy Baux commerciaux, n° 420-11

En cas de démembrement de propriété, seul l’usufruitier a la qualité de bailleur et doit, en conséquence, assumer, le cas échéant, le paiement de l’indemnité d’éviction due au preneur à bail commercial.

ANALYSE

La détermination du débiteur de l’indemnité d’éviction constitue un enjeu majeur en matière de baux commerciaux dans la mesure où le montant de l’indemnité d’éviction peut être conséquent et dépasser, dans certains cas, la valeur des murs.

À cet égard, afin notamment de protéger le preneur, la vente de l’immeuble ne décharge pas le précédent bailleur de payer l’indemnité d’éviction, même si l’acte de vente prévoit que l’acquéreur est seul débiteur de l’indemnité d’éviction. En effet, il s’agit d’une délégation imparfaite, de sorte que le locataire peut valablement demander le paiement de l’indemnité d’éviction à l’ancien bailleur qui a délivré le congé mais également au nouveau propriétaire 1.

Qu’en est-il en cas de démembrement de la propriété ?

Dans le cadre d’un arrêt motivé, la Cour de cassation définit de manière didactique qui est le débiteur de l’indemnité d’éviction en cas de démembrement de la propriété, en se fondant sur les obligations de l’usufruitier en matière de bail commercial, qui a seul la qualité de bailleur (II). Il convient préalablement de présenter les faits d’espèce et la solution retenue (I).

I – Sur les faits d’Espèce et la solution retenue

Dans le cadre de l’arrêt commenté, un usufruitier et un nu-propriétaire avaient délivré ensemble un congé comportant refus de renouvellement sans offre d’indemnité d’éviction à leur locataire.

Ce congé a par la suite été déclaré sans motif grave et légitime, de sorte que le preneur avait droit au versement d’une indemnité d’éviction puisque le congé qui lui avait été délivré avait mis fin au bail commercial dont il était titulaire.

La question qui se posait alors était de savoir qui était débiteur de cette indemnité d’éviction puisque le congé avait été délivré, d’une part, par l’usufruitier et, d’autre part, par le nu-propriétaire.

L’arrêt ayant fait l’objet d’un pourvoi prévoyait une condamnation solidaire du nu-propriétaire et de l’usufruitière pour régler l’indemnité d’éviction due au locataire.

Cet arrêt rendu par la Cour d’appel de Toulouse le 3 octobre 2018 est censuré au motif que seul l’usufruitier est débiteur de l’indemnité d’éviction, quand bien même le congé a également été délivré par le nu-propriétaire.

Pour arriver à cette solution, la Cour de cassation fonde son analyse sur les obligations pesant sur l’usufruitier qui a, seul, la qualité de bailleur.

II – Sur les obligations de l’usufruitier, qui a, seul, la qualité de bailleur

Dans le cadre d’une motivation détaillée, la Haute juridiction prend la peine de rappeler que, en cas de démembrement de la propriété, l’usufruitier ne peut pas consentir un bail commercial ou même le renouveler sans le concours du nu-propriétaire, et ce en application de l’article 595, alinéa 4, du Code civil qui dispose : « L’usufruitier ne peut, sans le concours du nu-propriétaire, donner à bail un fonds rural ou un immeuble à usage commercial, industriel ou artisanal. À défaut d’accord du nu-propriétaire, l’usufruitier peut être autorisé par justice à passer seul cet acte » 2.

La Cour de cassation cite, à cet égard, un arrêt du 24 mars 1999 3 aux termes duquel cette impossibilité pour l’usufruitier de conclure un bail commercial porte tant sur la conclusion du bail initial que sur le renouvellement puisque le texte de l’article 595, alinéa 4, du Code civil interdit en principe à l’usufruitier de « donner à bail (…) un immeuble à usage commercial » sans distinguer s’il s’agit de la conclusion du bail initial ou du renouvellement de bail 4.

La Cour de cassation passe ensuite à la seconde étape de son raisonnement consistant à distinguer la situation de la conclusion du bail de la situation relative à la délivrance d’un congé.

En effet, la Haute juridiction rappelle que l’usufruitier a le pouvoir de mettre fin au bail commercial et de notifier, en conséquence, au preneur un congé avec refus de renouvellement sans que le concours du nu-propriétaire ne soit nécessaire.

Elle cite à cet égard un arrêt du 29 janvier 1974 5 aux termes duquel l’usufruitier peut valablement délivrer un congé à un locataire, sans avoir à recueillir l’accord de son nu-propriétaire.

En conséquence, il convient de distinguer la situation de l’usufruitier selon qu’il s’agit :

  • de conclure un bail (qu’il s’agisse du bail initial ou d’un renouvellement) : en ce cas, l’usufruitier doit recueillir l’accord du nu-propriétaire ou, le cas échéant, une autorisation judiciaire ;
  • de délivrer un congé : dans une telle situation, l’usufruitier peut intervenir seul, sans l’accord du nu-propriétaire, puisqu’aucune disposition de l’article 595 du Code civil ne vient limiter les pouvoirs de l’usufruitier.

Indépendamment de cette distinction, qui repose sur l’étendue des pouvoirs de l’usufruitier, la Cour de cassation justifie la censure de l’arrêt de la cour d’appel par le fait que seul l’usufruitier à la qualité de bailleur et qu’il doit, à cet égard, assumer toutes les obligations du bailleur vis à vis du preneur.

Il est vrai qu’en application d’une jurisprudence établie 6, l’usufruitier a la qualité de bailleur et il doit en conséquence supporter, seul, les réparations et travaux exigibles au regard de son obligation de délivrance.

Toutefois, en l’espèce, le congé a été signifié par l’usufruitier et le nu-propriétaire.

Dans ces conditions, il aurait été possible de considérer que l’usufruitier et le nu-propriétaire, qui ont décidé d’un commun accord de délivrer un congé comportant refus de renouvellement, devaient être solidairement tenus au paiement de l’indemnité d’éviction.

La Cour de cassation a privilégié une interprétation stricte des dispositions relatives au démembrement de propriété en considérant que, dans la mesure où seul l’usufruitier a, en principe, la qualité de bailleur, le nu-propriétaire ne peut pas être condamné solidairement à régler ladite indemnité.

À cet égard, il convient de rappeler qu’en cas d’indivision, l’indemnité d’éviction est due par chacun des indivisaires.

Toutefois, cette responsabilité solidaire des différents indivisaires à comme corollaire le fait que le refus de renouvellement doit, sous peine de nullité, être signifié au nom et avec l’autorisation de chacun des coindivisaires ou, le cas échéant, après l’autorisation prévue par les articles 818-5 ou 815-6 du Code civil.

Par Hanan CHAOUI
Docteur en droit,
Avocat Associé,
Delcade, société d’avocats

1 Cass. 3e civ., 30 mai 2001, n° 00-10.111, Bull. civ. III, n° 69.

2 « L’usufruitier peut jouir par lui-même, donner à bail à un autre, même vendre ou céder son droit à titre gratuit. Les baux que l’usufruitier seul a faits pour un temps qui excède neuf ans ne sont, en cas de cessation de l’usufruit, obligatoires à l’égard du nu-propriétaire que pour le temps qui reste à courir, soit de la première période de neuf ans, si les parties s’y trouvent encore, soit de la seconde, et ainsi de suite de manière que le preneur n’ait que le droit d’achever la jouissance de la période de neuf ans où il se trouve. Les baux de neuf ans ou au-dessous que l’usufruitier seul a passés ou renouvelés plus de trois ans avant l’expiration du bail courant s’il s’agit de biens ruraux, et plus de deux ans avant la même époque s’il s’agit de maisons, sont sans effet, à moins que leur exécution n’ait commencé avant la cessation de l’usufruit. L’usufruitier ne peut, sans le concours du nu-propriétaire, donner à bail un fonds rural ou un immeuble à usage commercial, industriel ou artisanal. A défaut d’accord du nu-propriétaire, l’usufruitier peut être autorisé par justice à passer seul cet acte » (C. civ., art. 595).

3 Cass. 3e civ., 24 mars 1999, n° 97-16.856, Bull. civ. III, n° 78.

4 Il convient à cet égard de préciser que par un arrêt du 14 mars 2019 (Cass. 3ème civ. 14 mars 2019, n°17-27560), la Cour de cassation a déclaré nul un avenant conclu par un usufruitier, sans l’accord des nues-propriétaires, et qui prévoyait une réduction du loyer prévu dans le bail commercial.

5 Cass. 3e civ., 29 janv. 1974, n° 72-13.968, Bull. civ. III, n° 48.

6 Voir notamment, Cass. 3e civ., 13 déc. 2005, n° 04-20.567.

TEXTE DE LA DÉCISION (EXTRAITS)

« Sur le premier moyen :
Vu l’article 595, alinéa 4, du Code civil, ensemble l’article L. 145-14 du Code du commerce ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Toulouse, 3 octobre 2018), que, le 5 mars 2004, Mme X veuve V, usufruitière, et Mme D, nue-propriétaire, d’un immeuble à usage commercial, ont délivré à M. et Mme T, preneurs, un refus de renouvellement du bail sans indemnité d’éviction, lequel, par arrêt du 20 février 2008, a été déclaré sans motif grave et légitime ;
Attendu que, pour condamner in solidum Mmes X veuve V et D à payer l’indemnité d’éviction due aux preneurs, l’arrêt retient que Mme V et Mme D, laquelle a la qualité de bailleur, ayant, ensemble, fait délivrer un refus de renouvellement, sont toutes les deux redevables de l’indemnité d’éviction dès lors que l’acte de refus de renouvellement excède les pouvoirs du seul usufruitier ;

Attendu qu’en cas de démembrement de propriété, l’usufruitier, qui a la jouissance du bien, ne peut, en application de l’article 595, dernier alinéa, du Code civil, consentir un bail commercial ou le renouveler sans le concours du nu-propriétaire (3e Civ., 24 mars 1999, pourvoi n° 97-16.856, Bull. 1999, III, n° 78) ou, à défaut d’accord de ce dernier, qu’avec une autorisation judiciaire, en raison du droit au renouvellement du bail dont bénéficie le preneur même après l’extinction de l’usufruit ;
Qu’en revanche, l’usufruitier a le pouvoir de mettre fin au bail commercial et, par suite, de notifier au preneur, sans le concours du nu-propriétaire, un congé avec refus de renouvellement (3e Civ., 29 janvier 1974, pourvoi n° 72-13.968, Bull. 1974, III, n° 48) ;
Qu’ayant, seul, la qualité de bailleur dont il assume toutes les obligations à l’égard du preneur, l’indemnité d’éviction due en application de l’article L. 145-14 du Code de commerce, qui a pour objet de compenser le préjudice causé au preneur par le défaut de renouvellement du bail, est à sa charge ;

Qu’en condamnant la nue-propriétaire, in solidum avec l’usufruitière, alors que l’indemnité d’éviction n’était due que par celle-ci, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS,
CASSE ET ANNULE (…) ».

Cass. 3e civ., 19 déc. 2019, n° 18-26.162, P+B+I

Les formes du congé du bail commercial

Article publié au sein de la « Revue des Loyers» n°1001 de novembre 2019

Cass. 3e civ., 24 oct. 2019, n° 18-24.077, P+B+I

Mots-clés : Bail commercial • Congé • Acte d’huissier • Lettre recommandée • Nullité
Textes visés : Code de commerce – Articles L. 145-4 et L. 145-9
Repère : Le Lamy Baux commerciaux, n° xxx
Le preneur titulaire d’un bail commercial peut valablement délivrer un congé à l’expiration d’une période triennale, soit par acte extrajudiciaire, soit par lettre recommandée.

ANALYSE

La forme que doit revêtir le congé mettant fin au bail commercial fait régulièrement l’objet d’un contentieux. L’enjeu est important puisqu’en cas de nullité du congé délivré par le preneur, ce dernier est tenu de continuer à régler les loyers et charges dus au titre du bail.
Un bref rappel historique est nécessaire (I), avant d’analyser la solution rendue dans l’arrêt commenté (II).

I – RAPPEL HISTORIQUE DU FORMALISME APPLICABLE AUX CONGÉS

Avant l’entrée en vigueur de la loi du 18 juin 2014, dite loi Pinel 1, le congé devait être signifié par acte d’huissier, conformément aux dispositions de l’article L. 145-9 du Code de commerce, dans sa version alors applicable.
De nombreux baux prévoyant la possibilité de délivrer un congé par lettre recommandée, un contentieux a alors surgi concernant la validité d’une telle clause contractuelle.

La Cour de cassation a toutefois considéré que le congé devait être signifié par exploit d’huissier 2, conférant ainsi à l’article L. 145-9 du Code de commerce, sur ce point, un caractère d’ordre public, alors même qu’il n’était pas visé par les dispositions de l’article L. 145-15 du même code.

En conséquence, avant l’entrée en vigueur de la loi du 18 juin 2014, dite loi Pinel, les congés délivrés par lettres recommandées n’étaient pas valables 3.

Le droit positif semblait être établi, lorsque la loi du 18 juin 2014 est venue modifier les dispositions de l’article L. 145-9 du Code de commerce afin de prévoir que le bailleur comme le preneur pouvaient signifier un congé soit par lettre recommandée, soit par acte d’huissier 4.

Le but était, semble-t-il, de faciliter la délivrance des congés et d’économiser les frais liés à la délivrance d’un acte d’huissier, alors même que la délivrance d’un congé par lettre recommandée est susceptible de soulever des problèmes de sécurité juridique, notamment lorsque le destinataire refuse de récupérer le courrier recommandé. À l’inverse, une telle difficulté ne se rencontre pas en présence d’un acte d’huissier puisque les dispositions de l’article 659 du Code de procédure civile permettent de signifier valablement un acte à une personne absente ou qui refuse de recevoir l’acte.

En tout état de cause, indépendamment des considérations d’ordre pratique qui ont amené de nombreux praticiens à recommander la délivrance des congés par acte d’huissier plutôt que par lettre recommandée, la loi du 6 août 2015, dite loi Macron 5, a modifié de nouveau les articles L. 145-4 et L. 145-9 du Code de commerce, revenant en partie sur les modifications issues de la loi Pinel, un an après son entrée en vigueur.

En effet, d’après l’article L. 145-9 du Code de commerce, dans sa version issue de la loi du 6 août 2015, la délivrance du congé doit intervenir par exploit d’huissier :

« Par dérogation aux articles 1736 et 1737 du Code civil, les baux de locaux soumis au présent chapitre ne cessent que par l’effet d’un congé donné six mois à l’avance ou d’une demande de renouvellement. (…) Le congé doit être donné par acte extrajudiciaire. Il doit, à peine de nullité, préciser les motifs pour lesquels il est donné (…) ».

Toutefois, par dérogation à cet article, l’article L. 145-4 du Code de commerce prévoit que le preneur a la possibilité de délivrer, à l’expiration d’une période triennale, un congé soit par lettre recommandée soit par acte d’huissier.

Le but de la loi du 6 août 2015 était, en fait, de réserver la possibilité de délivrer un congé par lettre recommandée aux seuls locataires et d’imposer aux bailleurs la délivrance d’un congé par acte d’huissier.

II – LA SOLUTION RENDUE PAR L’ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2019

L’arrêt commenté du 24 octobre 2019 porte sur des faits assez classiques. Un locataire principal sous-loue une partie des locaux loués à un sous-locataire. Ce dernier souhaite résilier le bail de sous-location à l’échéance de la seconde période triennale et délivre, à cet effet, un congé par un courrier recommandé du 18 février 2016.
Le locataire principal, en sa qualité de bailleur, conteste la validité du congé délivré par son sous-locataire au motif qu’il a été délivré par lettre recommandée et non par exploit d’huissier et sollicite, en conséquence, le paiement des loyers postérieurs à la date de la seconde échéance triennale.

La Cour d’appel de Caen donne raison au bailleur et considère que le congé doit être nul dans la mesure où, en application de l’article L. 145-9 du Code de commerce, dans sa version applicable au 18 février 2016, correspondant à la date de délivrance du congé par le sous-locataire, le preneur ne pouvait délivrer un congé que par exploit d’huissier.

En effet, conformément à une jurisprudence constante, les nouvelles dispositions relatives au formalisme des congés sont d’application immédiate aux contrats en cours, en application de la théorie des effets légaux du contrat 6.

Néanmoins, la cour d’appel a considéré que seul l’article L. 145-9 du Code de commerce était applicable alors :

  • qu’il s’agit d’un article qui est applicable de manière générique tant au bailleur qu’au preneur ;
  • et qu’en vertu de l’article L. 145-4 du Code de commerce, qui ne vise que le preneur, ce dernier dispose de la possibilité de délivrer un congé par exploit d’huissier ou par lettre recommandée 7.

Au surplus, l’article L. 145-4 du Code de commerce est d’ordre public (puisqu’il est visé par l’article L. 145-15 du Code de commerce qui lui-même vise l’ensemble des dispositions impératives du statut des baux commerciaux), de sorte qu’il n’est pas possible d’y déroger pour contraindre, par exemple, le preneur à ne délivrer un congé que par exploit d’huissier.

La censure de la Cour de cassation était donc inévitable et la Haute juridiction reproche à la cour d’appel d’avoir violé les textes applicables en refusant d’appliquer l’article L. 145-4 du Code de commerce et en effectuant une application erronée de l’article L. 145-9 dudit code.

Le congé est donc validé et le sous-locataire va pouvoir, devant la cour d’appel de renvoi, solliciter le remboursement du paiement des loyers postérieurs à la date d’effet de la seconde période triennale.

La publicité donnée par la Cour de cassation à cet arrêt qui a été publié sur son site internet a pour but d’alerter les praticiens sur cette question qui, même si elle ne fait pas débat, est encore une source d’erreurs.

Hanan CHAOUI
Docteur en droit,
Avocat Associé,
Delcade, société d’avocats.

1 L n°2014-626,18 juin 2014,JO 19 juin
2 Voir par exemple,Cass.3e civ., 20 déc. 1982,n°81-13.495, Bull. civ. III, n°257.
3 En revanche, il convient de relever que la Haute juridiction a jugé que le bailleur, professionnel de l’immobilier, commettait une faute en n’alertant pas le locataire sur l’irrégularité du congé que celui-ci lui avait donné par lettre recommandée, et qu’en conséquence il devait réparer au locataire le préjudice subi du fait de la continuation du bail, à savoir en l’espèce le montant des loyers : Cass. 3e civ., 5 nov. 2003, n° 01-17.530, Bull. civ. III, n° 189.
4 « Le congé doit être donné par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par acte extrajudiciaire, au libre choix de chacune des parties. Il doit, à peine de nullité, préciser les motifs pour lesquels il est donné et indiquer que le locataire qui entend, soit contester le congé, soit demander le paiement d’une indemnité d’éviction, doit saisir le tribunal avant l’expiration d’un délai de deux ans à compter de la date pour laquelle le congé a été donné » (C. com., art. L. 145-9, issu de L. n° 2014-626, 18 juin 2014).
5 L.n°2015-990, 6 août 2015, JO 7 août.
6 Cass. 3e civ., 3 juill. 2013, n° 12-21.541, Bull. civ. III, n° 89.
7 « La durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans. Toutefois, le preneur a la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale, au moins six mois à l’avance, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par acte extrajudiciaire (…) » (C. com., art. L. 145-4, issu de L. n° 2015-990, 6 août 2015).

TEXTE DE LA DÉCISION (EXTRAITS)

« Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 145-4 et L. 145-9 du Code de commerce, dans leur rédaction issue de la loi du 6 août 2015 ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Caen, 6 septembre 2018), que, le 1er septembre 2010, la société Sanor Aeos, locataire principale de locaux à usage commercial, en a sous-loué une partie à la société Qualiterre ; que, par lettre recommandée du 18 février 2016, celle-ci lui a donné congé pour l’échéance triennale du 1er septembre 2016 ;
Attendu que, pour déclarer nul ce congé, l’arrêt retient que le congé visant à mettre un terme à un bail commercial ne peut être délivré par le preneur que dans les délais et suivant les modalités prévues par l’article L. 145-9 du Code de commerce qui, dans sa version applicable au 16 février 2016 et issue de la loi du 6 août 2015, imposait la délivrance du congé par acte extrajudiciaire ;
Qu’en statuant ainsi, alors que l’article L. 145-4, dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2015, confère au preneur la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale, au moins six mois à l’avance, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par acte extrajudiciaire, la cour d’appel a violé les textes susvisés, le premier par refus d’application et le second par fausse application ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE (…) ».

Cass. 3e civ., 24 oct. 2019, n° 18-24077, P+B+I