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Le Conseil d’Etat juge que l’exigence de protection des paysages peut aussi s’apprécier en considération d’éléments artistiques. Une décision qui ouvre la voie à de nouveaux moyens contentieux.
Jusqu’où peut-on aller dans la protection des paysages ? Et surtout, les paysages décrits dans des œuvres littéraires, qui par essence présentent un caractère immatériel, peuvent-ils légalement servir de fondement à un refus d’autorisation environnementale ?
A cette question inédite, le Conseil d’Etat répond par l’affirmative (CE, 4 octobre 2023, n° 464855, mentionné dans les tables du recueil Lebon). Etait en cause la contestation d’un arrêté, par lequel la préfète d’Eure-et-Loir a refusé de faire droit à la demande d’autorisation environnementale portée par une société, pour la création d’un parc éolien composé de 12 éoliennes (ramené à huit après l’enquête publique), d’une hauteur en bout de pale de 150 mètres. Ce parc était projeté sur le territoire de trois communes rurales – Méréglise, Vieuvicq et Montigny-le-Chartif – à environ 5 km au sud-ouest du village d’Illiers-Combray, terres rendues célèbres par Marcel Proust qui les évoque dans « A la recherche du temps perdu ».
Nécessaire protection du paysage et du patrimoine
S’appuyant sur l’oeuvre littéraire de l’écrivain, la préfète a considéré que le projet était de nature à porter atteinte au paysage et patrimoine culturel visés à l’article L. 511-1 du Code de l’environnement, relatif aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), en raison de sa visibilité depuis plusieurs monuments historiques de la commune d’Illiers-Combray. Laquelle était par ailleurs classée site patrimonial remarquable (SPR).
Actions culturelles. La cour administrative d’appel (CAA) de Versailles avait rejeté la demande d’annulation de l’arrêté Environnement Eolien : comment la littérature peut servir de fondement pour refuser une autorisation Le Conseil d’Etat juge que l’exigence de protection des paysages peut aussi s’apprécier en considération d’éléments artistiques. Une décision qui ouvre la voie à de nouveaux moyens contentieux. préfectoral formée par la société. Les juges avaient considéré qu’« eu égard à l’ensemble de ces éléments [configuration des lieux, taille des éoliennes projetées, covisibilité], la réalisation du projet de parc éolien […] risquerait de porter une atteinte significative non seulement à deux monuments historiques, mais aussi au site remarquable classé et à l’intérêt paysager et patrimonial du village d’Illiers-Combray, où des acteurs publics et privés réalisent des actions culturelles autour de l’oeuvre de Marcel Proust, dont les évocations littéraires sont encore pour partie matériellement inscrites dans ces lieux » (CAA Versailles, 11 avril 2022, n° 20VE03265).
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A paraître au numéro N°6272, du 10/11/2023.
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