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Lettre d'information - Le Radar n°1
Distribution – Rupture brutale des relations commerciales en Outre-Mer : la « nécessaire » prise en compte de la loi Lurel dans l’évaluation du préavis suffisant
30/07/2024

En l’espèce, les sociétés Diagnostica Stago et BSA avaient conclu en 2002 un contrat de distribution exclusive des produits Stago pour la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane, tacitement reconductible pour une durée d’un an, sauf dénonciation par les parties trois mois avant la fin de la période contractuelle. En contrepartie de l’exclusivité consentie à la société BSA, cette dernière a été soumise à une obligation d’approvisionnement exclusif, un engagement d’achats minimum et à une obligation de non-concurrence.

En juillet 2013, la société Diagnostica Stago avait notifié à la société BSA le non-renouvellement du contrat de distribution exclusive à l’échéance du 31 décembre 2013. La société BSA avait assigné la société Diagnostica Stago devant le Tribunal de commerce de Paris pour rupture abusive et brutale de la relation commerciale établie qui l’avait débouté de l’ensemble de ses demandes.

C’est dans ces circonstances que l’affaire s’est retrouvée devant la Cour d’appel de Paris, qui est d’abord venue confirmer le jugement en ce qu’il avait considéré que la rupture par la société Diagnostica Stago de la relation n’était pas abusive. 

S’agissant de la brutalité de la rupture de la relation établie, la Cour d’appel est venue rappeler, sous l’empire de l’ancien l’article L442-6, I, 5°, les critères pertinents pour la détermination du préavis suffisant et a tenu compte notamment de la spécificité du marché d’outre-mer.

Selon la Cour, il était ainsi « nécessaire » de prendre en compte la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer, dite loi « Lurel », qui a interdit, à compter du 22 mars 2013, les importations exclusives non justifiées dans les collectivités d’outre-mer, et rendait ainsi plus difficile la reconversion de la société BSA en ce qu’il lui était désormais impossible de retrouver un partenariat (exclusif) équivalent. 

Il s’ensuit que la Cour a considéré en l’espèce que le préavis nécessaire et suffisant s’établissait à 10 mois, en vertu de quoi le préavis de 5 mois donné par la société Diagnostica Stago à BSA pour une relation d’une ancienneté de 14 ans était donc insuffisant. 

Il faut par ailleurs souligner le fait que l’interdiction des accords d’importation exclusive, posée par la loi Lurel, était déjà en vigueur depuis mars 2013 de sorte que la société Diagnostica Stoga, en ne donnant un préavis à la société BSA qu’en juillet 2013, était déjà « en retard » de 5 mois pour se mettre en conformité. À notre sens, ce facteur a très certainement été pris en compte par la Cour d’appel pour fixer la durée du préavis suffisant à 10 mois étant donné qu’ainsi la durée du préavis non-respectée par Diagnostica Stoga, et donc à indemniser à la société BSA, était de 5 mois. 


Anaïs Bayeul
Avocate
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