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Le Moniteur
Analyse de jurisprudences – Février 2023
28/02/2023

Le moniteur des travaux et du bâtiment, n°6233 (17/02/2023)

Bail emphytéotique – Les personnes publiques n’ont pas l’obligation de mettre en concurrence les occupants de leur domaine privé

CE, 2 décembre 2022, n° 460100, publié au Recueil.

La commune de Biarritz a décidé de conclure un bail emphytéotique de 75 ans portant sur les murs et dépendances de l’hôtel du Palais. Des conseillers municipaux ont contesté la délibération autorisant le maire à signer le contrat, en estimant que l’attribution de ce bail aurait dû être précédée d’une procédure de publicité et de mise en concurrence préalable.

Question

L’organisation d’une telle procédure était-elle obligatoire ?

Réponse

Non. L’article 12 de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006, transposé à l’article L. 2122-1-1 du Code général de la propriété des personnes publiques, implique de telles obligations préalablement à la délivrance d’autorisations d’occupation du domaine public permettant l’exercice d’une activité économique, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’UE. Mais il ne résulte ni des termes de cette directive ni de cette jurisprudence que de telles obligations s’appliqueraient aux personnes publiques préalablement à la conclusion de baux portant sur des biens appartenant à leur domaine privé. Ceci en effet ne constitue pas une autorisation pour l’accès à une activité de services ou à son exercice au sens du 6° de l’article 4 de la directive précitée.

CCAG travaux – Un différend entre le titulaire du contrat et l’acheteur impose au premier de présenter un mémoire en réclamation

CE, 29 décembre 2022, n° 458678, mentionné dans les tables du Recueil.

Le Grand port maritime de Marseille a confié à une société un marché portant sur la réalisation de travaux de dragage d’entretien des postes d’attente fluviaux sur plusieurs bassins du port.

Un différend est né entre les cocontractants, ce qui a conduit à la résiliation du marché. Cette décision a été contestée par la société anciennement titulaire du marché, à laquelle le port a opposé l’irrecevabilité de sa demande faute d’avoir procédé à la réclamation préalable prévue par l’article 50.1.1 du CCAG travaux.

Question

L’exigence d’une telle réclamation préalable à la saisine du juge est-elle fondée ?

Réponse

Oui. Il résulte des stipulations des articles 46.2.1 et 50.1.1 du CCAG travaux (édition 2014) « que lorsqu’intervient, au cours de l’exécution d’un marché, un différend entre le titulaire et l’acheteur, résultant d’une prise de position écrite, explicite et non équivoque émanant de ce dernier et faisant apparaître le désaccord, le titulaire doit présenter, dans le délai qu’elles prescrivent, un mémoire en réclamation, à peine d’irrecevabilité de la saisine du juge du contrat ».

Passation – Un tiers ne peut contester, dans un recours pour excès de pouvoir, les actes d’approbation formels d’un contrat

CE, 2 décembre 2022, n° 454318, mentionné dans les tables du Recueil.

Le conseil d’administration de l’Ecole normale supérieure (ENS) de Lyon a approuvé une convention conclue entre l’Etat, l’école et la communauté d’universités et établissements « Université de Lyon », visant à confier à cette dernière la souscription et la mise en œuvre d’un contrat de partenariat pour la réhabilitation et la restructuration d’un site de l’ENS. Des tiers au contrat ont introduit un recours pour excès de pouvoir contre cette délibération approuvant la convention préalablement signée par le président.

Question

Un tel recours est-il recevable ?

Réponse

Non. Indépendamment du recours « Tarn-et-Garonne » dont disposent les tiers à un contrat administratif, ceux-ci, lorsqu’ils se prévalent d’intérêts auxquels l’exécution du contrat peut porter une atteinte directe et certaine, sont recevables à contester devant le juge de l’excès de pouvoir la légalité de l’acte administratif approuvant le contrat. Toutefois, les actes d’approbation ici visés sont seulement ceux qui émanent d’une autorité distincte des parties contractantes, qui concernent des contrats déjà signés et sont nécessaires à leur entrée en vigueur. Ne sont pas au nombre de ces actes ceux qui, comme en l’espèce, « même s’ils indiquent formellement approuver le contrat, participent en réalité au processus de sa conclusion ».

Gilles Le Chatelier
Avocat associé
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