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Lettre d’information – Le Radar n°6
L’Autorité de la Concurrence condamne Doctolib à 4,6 millions d’euros pour abus de position dominante sur la prise de rendez-vous médicaux en ligne 
22/12/2025

Par une décision en date du 6 novembre 2025, l’Autorité de la concurrence a sanctionné la société Doctolib à une amende de 4 665 000 € pour plusieurs pratiques constitutives d’abus de position dominante sur le marché des services de prise de rendez-vous médicaux en ligne et sur celui des solutions technologiques permettant la réalisation de téléconsultation.

1.          La position dominante de Doctolib

La décision révèle que Doctolib détient une position dominante sur deux marchés distincts : d’abord, sur le marché des services de prise de rendez-vous médicaux en ligne, depuis 2017 au-moins, avec des parts de marché constantes supérieures à 50% (entre 2017 et 2022) et dépassant certaines années 90% ; ensuite, sur celui des solutions technologiques dédiées permettant la réalisation de téléconsultation, depuis 2019, avec des parts de marché supérieures à 40%.

Dans les deux cas, cette domination est renforcée par la présence de barrières significatives à l’entrée et l’absence de puissance d’achat susceptible de contrebalancer la position de Doctolib.

2.          Les pratiques d’exclusivité et de ventes liées constitutives d’un abus de position dominante 

Il est reproché à la société d’avoir mis en œuvre plusieurs pratiques anticoncurrentielles constituant un abus de position dominante au sens de l’article 102 du TFUE et de l’article L.420-2 du Code de commerce.

La première consiste en l’imposition de clauses d’exclusivité dans les contrats d’abonnement des professionnels, ayant pour effet de leur interdire ou de les dissuader de recourir à des logiciels concurrents, tant pour les services de prise de rendez-vous en ligne que pour les solutions de téléconsultation. L’Autorité relève que Doctolib a maintenu ces clauses en pleine connaissance de leur illégalité au regard du droit de la concurrence.

La seconde pratique consiste en la mise en place de ventes liées, conditionnant l’accès par les professionnels à la solution « Doctolib Téléconsultation » à une souscription préalable obligatoire au service « Doctolib Patient ». Ce faisant, les professionnels de santé étaient donc forcés de souscrire et payer simultanément les deux prestations, renforçant mécaniquement la position de Doctolib sur le marché des prises de rendez-vous.

L’Autorité considère que ces pratiques, mises en œuvre de manière coordonnée, s’inscrivaient dans une stratégie globale visant à verrouiller les marchés concernés et à évincer les concurrents.

3.          L’acquisition prédatrice du concurrent « MonDocteur »

L’Autorité sanctionne également l’acquisition par Doctolib, en 2018, de son principal concurrent, la société MonDocteur, considérant que cette acquisition avait été réalisée dans le seul but d’évincer ce dernier et de verrouiller le marché national des services de prises de rendez-vous.

Cette opération aurait permis à Doctolib de gagner 10 000 nouveaux professionnels, et renforcer sensiblement ses parts de marchés. L’Autorité relève à cet égard que Doctolib a ultérieurement pu procéder à plusieurs augmentations de tarifs, sans que cela n’engendre de perte de clientèle ou ne freine sa croissance, et ce bien que des plateformes concurrentes pratiquaient des prix inférieurs.

Il convient de préciser que ce rachat n’est pas sanctionné au titre du droit des concentrations, mais sur le fondement de l’abus de position dominante en application de la jurisprudence Towercast. Il s’agit de la première application de cette jurisprudence européenne en France.

En effet, l’opération se situant sous les seuils de notification qui auraient déclenché un contrôle préalable des autorités de concurrence, et l’Autorité ne disposant pas encore d’un pouvoir d’évocation, seule la qualification d’abus de position dominante, telle qu’interprétée par la jurisprudence Towercast, permettait de sanctionner cette acquisition prédatrice.

Article co-écrit avec : Samuel GRASSIN, stagiaire

Olivier Gauclère
Avocat Counsel
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