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Affichage du permis de construire : le Conseil d’État rejette les photographies numériques horodatées comme preuve suffisante
31/03/2025

Par une décision en date du 10 mars 2025, le Conseil d’Etat a jugé que des photographies prises par le bénéficiaire d’un permis de construire (PC) ne sont pas suffisantes pour prouver l’affichage régulier dudit PC, compte tenu de la possibilité de modifier leurs métadonnées numériques.

En l’espèce, un permis de construire (PC) et un permis de construire modificatif (PCM) en vue de la réhabilitation à l’identique d’une ancienne ferme ont été délivrés par le maire de Saint-Restitut au pétitionnaire.

Un voisin a saisi le Tribunal administratif (TA) de Grenoble d’une requête aux fins d’annulation de ces deux arrêtés le 1er avril 2019. Le bénéficiaire a alors opposé une fin de non-recevoir, jugeant la requête du TA irrecevable pour tardiveté.

En effet, le délai de recours contre une autorisation d’urbanisme commence à courir à compter du premier jour d’une période continue de deux moisd’affichage (article R.600-2 du code de l’urbanisme).

Or, le pétitionnaire soutenait avoir affiché le permis de construire dès le 28 janvier 2019 et produisait, à l’appui de son allégation :

  • des photographies du panneau d’affichage qu’il avait lui-même prises en soutenant que les métadonnées numériques associées à ces photographies attestaient de leur date de prise de vue ;
  • une attestation peu circonstanciée d’un voisin et celle d’un tiers faisant état d’un affichage les 2 et 3 mars 2019.

Tant le TA que la Cour administrative d’appel (CAA) de Lyon (24 janvier 2023, n° 21LY01670) ont rejeté la fin de non-recevoir, au motif que la preuve de l’affichage régulier et continu du permis de construire n’était pas rapportée.

Saisi du litige, le Conseil d’Etat rappelle d’abord qu’il incombe au bénéficiaire d’un PC de justifier qu’il a bien accompli les formalités d’affichage prescrites par le code de l’urbanisme.

Il ajoute que, compte tenu des possibilités techniques de modifier leurs métadonnées numériques, la date des photographies produites ne pouvait être regardée comme présentant des garanties d’authenticité suffisantes pour attester du caractère régulier et continu de l’affichage du PC. La Cour a donc, à bon droit, écarté la fin de non-recevoir opposée par le pétitionnaire du permis.

Il résulte de ce qui précède qu’une preuve numérique ne peut être retenue par les juges que lorsque son authenticité est garantie.

En matière d’affichage du permis de construire, le recours à des constats de commissaire de justice semble demeurer le mode de preuve le plus fiable, même s’il n’est pas le seul.

A cet égard, la CAA de Lyon a récemment jugé qu’un coffre-fort numérique de type « Digiposte » bénéficiait d’une sécurité suffisante, notamment s’agissant des dates de versement des documents, pour établir la régularité de l’affichage d’un PC (CAA Lyon 12 décembre 2023, n° 21LY04307).

Lucie Pernet
Avocate associée
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