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Contrats Publics
Accords-cadres : précisions sur le plafond et l’exception à l’obligation de remise en concurrence
25/08/2022

Au cours des derniers mois, la CJUE et le Conseil d’État ont rendu des arrêts importants concernant les accords-cadres. En effet, le 17 juin 2021, la CJUE a jugé qu’il existait une obligation de fixer un maximum en valeur ou en quantité de l’accord-cadre au stade de sa passation et le Conseil d’État en a tiré les conséquences sur le plan interne. En outre, dans une autre décision datée du 3 février 2022, la CJUE a apporté d’intéressantes précisions sur le régime juridique relatif à la cession d’un accord-cadre concernant la substitution d’attributaire par suite d’une opération de restructuration à la suite d’une succession partielle ou universelle du cocontractant initial.

Technique d’achat relativement nouvelle, l’accord-cadre a conquis progressivement les acheteurs et s’est imposé aujourd’hui dans le paysage juridique de la commande publique. Si les premiers textes relatifs à celui-ci datent de la directive européenne 93/38/CE (1) , ce n’est pourtant que dans les directives marchés 2004/17/CE (2) et 2004/18/CE (3) que son régime juridique a été précisé. Et ce n’est que le Code des marchés publics issu du décret du 28 août 2006 (4) qui a introduit cette notion dans le droit national, d’abord de manière distincte des marchés à bons de commandes puis, commune, ces derniers ayant été intégrés dans sa définition par la directive européenne 2014/24/UE (5) . L’article 33 de cette dernière directive énonce ainsi aujourd’hui qu’« un accord-cadre est un accord conclu entre un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et un ou plusieurs opérateurs économiques ayant pour objet d’établir les conditions régissant les marchés à passer au cours d’une période donnée, notamment en ce qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées ». L’article L. 2125-1 du Code de la commande publique précise désormais que l’accord-cadre « permet de présélectionner un ou plusieurs opérateurs économiques en vue de conclure un contrat établissant tout ou partie des règles relatives aux commandes à passer au cours d’une période donnée ». La place de l’accord-cadre dans le champ de la commande publique est donc particulière, puisqu’il est cité au rang des techniques d’achats de même que le concours, le système de qualification ou encore le système d’acquisition dynamique. Il s’agit donc d’une procédure mise en œuvre par l’acheteur en amont de la conclusion d’un marché, qui vise à établir les fondations de la relation contractuelle sur lesquelles viendront, par la suite, s’appuyer un ou plusieurs marchés publics. L’originalité de l’accord-cadre tient pour l’essentiel à la faculté offerte aux acheteurs de disposer d’une certaine souplesse quant à la quantification des besoins à satisfaire notamment s’agissant du volume de ceux-ci. Le régime juridique de l’accord-cadre révèle également une certaine liberté : leur durée est limitée en principe à quatre ans sauf exception (6) , et il est possible de les conclure avec un seul ou plusieurs attributaires (7) . Curieusement, jusqu’à récemment, l’accord-cadre n’avait fait que peu parler de lui que sur le terrain contentieux, les principales occurrences dans la jurisprudence se cantonnant essentiellement sans grande originalité à juger de ses conditions d’attribution, à l’appréciation des modalités d’encadrement des obligations et engagements des parties en ce qui concerne sa durée (8) ou bien encore le principe d’exclusivité des titulaires (9) . Par deux décisions récentes rendues sur renvoi préjudiciel portant sur l’interprétation de la directive 2014/24/UE en date du 17 juin 2021 et du 3 février 2022, la Cour de justice de l’Union européenne a cependant placé les accords-cadres sous les feux de la rampe. Elle l’a d’abord fait avec fracas dans sa décision rendue le 17 juin 2021 (10) en jugeant qu’il existait une obligation de fixer un maximum en valeur ou en quantité de l’accord-cadre au stade de sa passation. Les arrêts ici commentés du Conseil d’État s’inscrivent dans le prolongement de cette jurisprudence pour en tirer les conséquences sur le plan interne ; c’est avec plus de mesure en revanche que la CJUE a également apporté d’intéressantes précisions sur le régime juridique relatif à la cession d’un accord-cadre relatif à une substitution d’attributaire par suite d’une opération de restructuration à la suite d’une succession partielle ou universelle du cocontractant initial.

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Pour en savoir plus:

https://www.moniteurjuris.fr/inte/document/REVUE/CPC233R03S02F05

REVUE CONTRATS PUBLICS – N° 233 – 

Laurent Sery
Avocat associé
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Mathilde Triantafyllou
Avocate
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